Edito – Fév 2017

Un New Deal  corse

Par Jean Poletti

Vers quel horizon s’oriente la Corse ? Désormais parvenue  devant une sorte de carrefour sociétal elle ne peut se fourvoyer dans une voie de traverse. Tout retour en arrière lui sera interdit. Nous sommes  confrontés à un choix majeur. Celui qui va dicter le futur collectif d’un peuple.  Le bilan de nos  difficultés  est désormais  connu. Les  remèdes multiples et variés furent dans le passé des cautères sur jambes de bois.  Précarité, économie en berne, jeunesse désemparée, chômage endémique. Chi fa ? Se complaire dans les récriminations ou se draper dans le fatalisme ? Tenter de trouver encore et toujours des coupables extérieurs  afin de pallier nos propres  errements ? Les faits sont têtus. La vérité aussi. Notre pseudo développement repose  à maints égards sur  les piliers du tourisme et des travaux publics.

 La  féroce concurrence du marché des loisirs  laisse l’ile  face à ses carences et  au refus  de nous  immerger sans réticence dans ce secteur lors des décennies écoulées. La  fin de la manne financière étatique a étranglé les entreprises qui vivaient presque exclusivement de grands travaux structurants.  Au passage il est  assez cocasse d’entendre les  adeptes du libéralisme  flétrir à tout bout de champ  l’Etat interventionniste, et  en même temps lui réclamer à cors et à cris  des subsides pour remplir leurs carnets de commande. Tocqueville et Marx  jouant a embrassons- nous fol amour !

Nul besoin de s’abreuver aux propos d’économistes patentés pour se rendre compte que la Corse est en panne.   Certes l’antienne  officielle  nous affirma  depuis des lustres  que l’embellie était à portée de main. Mirage sans cesse évoqué et  qui ne se réalisa jamais. Entre fausses vérités et  sempiternelles  vallées des larmes la Corse décroche. Elle s’installe insidieusement dans un marasme ambiant. Le sursaut doit impérativement  placer au centre de la réflexion un concept qui  vaut doctrine et tient en un mot : sursaut.   N’est-ce pas  le moment d’imaginer un new-deal insulaire qui bannisse les recettes  éculées  pour embrasser l’innovation non pas  technologique, mais celle  qui doit  s’ancrer dans les  dans les esprits.

Là est le point de départ  d’un possible progrès collectif. Il implique que  s’esquisse rapidement un  projet pour la Corse  expurgé des vieilles lunes,  des clivages  surannés et de  la méthode Coué.   Dire enfin et une bonne fois pour toutes  quel  devrait être le visage d’une ile dans la prochaine décennie.   Faut-il donner au tourisme la part du lion dans le développement ? Alors il ne faut plus  tergiverser. Le dire clairement.  Lui offrir enfin les moyens de s’épanouir et le repenser pour qu’il profite de manière directe et induite à l’ensemble des activités. Et à l’emploi. Doit-on pousser les feux des nouvelles technologies pour  hisser dans ce domaine une communauté au rang d’excellence ?  A cet égard  il ne faudra pas se contenter  de quelques exemples de réussites individuelles, mais instaurer  une  véritable culture de l’innovation. Et en toile de fond jouer la complémentarité entre littoral et intérieur, briser les excroissances anarchiques des grandes villes, qui voisineront bientôt avec un désert  démographique.   Voilà quelques pistes. Elles sont validées par la nouvelle majorité territoriale qui foule aux  pieds le fatalisme. Le chantier est vaste. Nul n’en disconvient. Mais s’atteler à la tâche sera sans doute un premier pas vers la réussite.

Il faut admettre et comprendre  que nous sommes au milieu du gué. Les risques sont perceptibles.  Ecoutons  le grand théoricien politique  Antonio  Gramsci nous  dire « Le vieux monde  se meurt, le nouveau monde  tarde à apparaitre et dans ce clair-obscur  surgissent les monstres. »

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