Nous devons tous contribuer à la transition énergétique de la Corse

Vincent de Rul est un globe-trotter. Après de nombreuses missions à l’étranger, il est depuis mai 2021, le directeur régional d’EDF. Discret, affable et sans langue de bois, il est un des spécialistes des questions liées à la transition énergétiques, à la décarbonisation, fil rouge affiché par le monde politique à l’horizon 2050. 

Par Anne-Catherine Mendez

Vous avez un parcours atypique, pouvez-vous nous en parler ?

Quand on me pose cette question, j’aime à dire que je suis marié, que j’ai trois enfants âgés de 23, 20 et 12 ans. C’est sans doute le plus important pour moi. D’un point de vue professionnel, je suis dans le groupe EDF depuis 25 ans, depuis la fin de mes études d’ingénieur accomplies à l’École Nationale Supérieure des Arts et Métiers. Mais juste avant d’intégrer l’entreprise, j’ai effectué mon service national en tant que coopérant en Italie, auprès de l’ENEL, qui est l’équivalent d’EDF en Italie. C’est sans doute de cette expérience qu’est né mon gout pour travailler à l’international et l’intime conviction que mes enfants devraient vivre une expérience hors du sol français. 

Mais ce n’était pas pour tout de suite et de retour en France, j’ai intégré EDF, à Lyon dans un premier temps, dans une entité d’ingénierie. Nous étions chargés de modéliser et de diagnostiquer la performance énergétique de centrales localisées à l’étranger. Ensuite départ pour Strasbourg, où j’étais chargé des essais de performance de ces mêmes entités. Pendant cette période, de 2000 à 2006, je me suis donc déplacé de nombreuses fois à l’étranger, Italie, Mexique, Égypte, Vietnam. Ce qui a nécessairement alimenté ce désir de travailler hors de France. Désir exaucé avec un poste de chef de projet en Italie à Turin à la FENICE, une filiale d’EDF, pendant environ 4 ans. Ensuite, nous sommes partis en Russie, à Moscou, pendant 6 ans, toujours au sein d’une filiale du groupe qu’il a fallu développer. Ce fut une période très enrichissante à tous les points de vue, personnelle et professionnelle, qui a marqué l’ensemble de la famille, durablement.

En 2016, je suis nommé à Londres. L’essentiel de mon activité consistait à développer des offres en lien avec la transition énergétique : efficacité énergétique, mobilité électrique,…. J’ai découvert au Royaume-Uni, un environnement difficile, très concurrentiel, mais qui m’a aussi amené à travailler dans un environnement plein de créativité et d’innovation.

5 ans plus tard, on me propose le poste de directeur régional en Corse, territoire que je ne connaissais pas du tout. J’ai accepté avec à la fois l’envie d’apprendre et de transmettre mon expérience. Je suis arrivé à Ajaccio en mai 2021. J’ai découvert les équipes, les métiers, les sites en sachant qu’en Corse, l’entreprise regroupe à la fois les deux entités, EDF et ENGIE. J’ai rencontré nos partenaires, politiques et institutionnels pour contribuer à mettre en œuvre la stratégie énergétique de la Corse.

Quels en sont les enjeux ?

Au quotidien, l’enjeu principal est de maintenir l’équilibre entre l’offre et la demande d’électricité. En même temps, à court, moyen et long terme, nous devons contribuer à la transition énergétique de la Corse, notamment en facilitant l’intégration des énergies renouvelables dans la production. Nous accompagnons également les clients dans la sobriété énergétique, qui est un pilier essentiel de la transition énergétique et nous favorisons le développement de la mobilité électrique, en permettant par exemple, aux bornes électriques d’être installées dans des conditions optimales afin de ne pas pénaliser l’équilibre de l’ensemble du réseau. Au sein de l’entreprise, nous sommes chargés d’assurer le développement des compétences du personnel afin d’accompagner nos équipes à acquérir de nouveaux savoirs dans une dynamique concertée.   

En Corse, comment est produite l’électricité que nous consommons ?

Sur le territoire insulaire, nous avons plusieurs sources d’approvisionnement. 1/3 de l’énergie est issu des centrales du Vazzio et de Lucciana, 1/3 provient de Sardaigne à travers les câbles SARCO (Sardaigne-Corse) et SARCOI (Sardaigne-Corse-Italie) et enfin le dernier tiers est alimenté par la part des énergies renouvelables, ou non carbonées. (hydrauliques, éoliens, photovoltaïques). Notre objectif est de pouvoir augmenter la part de moyens non carbonés. 

La Corse est-elle en retard en termes d’équipements liés aux énergies renouvelables ?

Nous ne sommes pas du tout en retard, nous sommes même un territoire bien loti, mais nous pouvons toujours faire mieux.

Comment, quels sont les axes de développement ? 

Nous pouvons travailler avec les producteurs d’énergie photovoltaïques en particulier, afin qu’ils puissent investir dans des installations qui ne pénalisent pas le réseau, qui contribue à sa stabilité. Ainsi l’énergie produite dans ces conditions permettra d’augmenter leur contribution. Nous devons également développer des opérations de maîtrise et d’efficacité énergétique en partenariat avec l’agence de l’urbanisme et de l’énergie (AUE). Elles permettent de manière efficace de faire bénéficier aux clients d’aides à l’isolation, aux changement de chaudière, à l’éclairage etc..

La centrale du Vazzio, est-elle encore en situation de fonctionnement optimale ?

La centrale rend aujourd’hui le service qu’on lui demande au prix d’investissements humains et financiers importants. Il est urgent de pouvoir lancer la construction d’une nouvelle centrale.

Aujourd’hui, on parle de crise énergétique, quelle est la situation en Corse ?

La Corse, paradoxalement, du fait de son isolement, c’est-à-dire du fait qu’elle est faiblement interconnectée à d’autres territoires, est protégée. Sa fragilité en terme énergétique n’est ni plus faible, ni plus importante que celle de l’année dernière. 

La Corse, est une terre sur laquelle j’apprends tous les jours. L’accueil reçu aussi bien personnel que professionnel est sincèrement bienveillant; J’ai juste la frustration de voir certains dossiers structurants qui n’avancent pas.

Revenons à vous, avez-vous des regrets ?

Non aucun 

De quoi êtes vous fier ? 

Je suis fier, d’avoir pu donner une ouverture culturelle à mes enfants et d’avoir apporté quelque chose dans les différentes missions que j’ai effectuées. 

Votre devise ?

Ne jamais abandonner.

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