FRANCE 3 CORSE VIA STELLA

Corsica Sera, le miroir de notre société

LE 16 DÉCEMBRE DERNIER, LE CORSICA SERA A FETE SES 40 ANS. RENDEZ-VOUS INCONTOURNABLE DE L’INFORMATION INSULAIRE, CE JOURNAL TÉLÉVISÉ EMBLÉMATIQUE A SU S’ADAPTER, COMME L’ENSEMBLE DE LA CHAÎNE, AUX NOUVEAUX ENJEUX DE NOTRE SOCIÉTÉ SANS TRAHIR LES FONDAMENTAUX DU JOURNALISME. DIRECTEUR DE LA RÉDACTION DE FRANCE 3 CORSE VIASTELLA, SÉBASTIEN TIERI REVIENT SUR CETTE AVENTURE FAITE DE TRANSMISSION ET D’INNOVATION.

Par Caroline Ettori

France 3 Corse ViaStella vient de fêter les 40 ans de son journal télévisé. C’est une étape importante à la fois dans la vie d’une chaîne et d’un territoire?

Ces 40 ans d’informations sont un miroir de la société. Jusque-là, la Corse n’avait droit qu’à quelques minutes d’information dans le journal de Marseille et encore pas tous les soirs, alors même qu’elle connaissait des mouvements politiques et sociétaux d’ampleur. L’apparition du Corsica Sera sur les écrans le 16 décembre 1982 a constitué une véritable révolution. Quand on a été puiser dans les archives pour retrouver les témoignages, on a pu en mesurer l’intensité.

En tant que rédacteur en chef de la rédaction de France 3 Corse ViaStella, vous êtes aux premières loges pour constater et accompagner l’évolution de cette rédaction. Comment s’est-elle adaptée aux grands bouleversements de notre société?

Aujourd’hui, la rédaction c’est 45 journalistes mais aussi des personnels techniques, administratifs, des planificateurs, des documentalistes. Ce sont à peu près 70 personnes qui travaillent à la réalisation de ce qu’on appelle l’offre linéaire, c’est- à-dire ce qui est diffusé à la télévision. Ce sont donc trois éditions d’information par jour à 12h, à 19h avec le Corsica Sera qui reste l’édition phare de l’offre éditoriale puis à 20h avec U nutiziale exclusivement en langue corse. Nous comptons sept magazines d’information et bien sûr notre offre numérique, une antenne permanente et en temps réel. On a dû s’adapter aux modes de consommation de l’information. L’offre s’est étendue, elle s’est multipliée. Toutefois, le téléspectateur ou l’abonné est en recherche d’un média de référence qui va valider l’information. Les études d’opinion le montrent, ViaStella a acquis ce statut en termes de notoriété et de sérieux. C’est notre force. Cela concerne les réseaux sociaux et Internet mais également la télévision puisque nous atteignons 52% de part d’audience à 19h, un taux record, trois fois supérieur aux autres éditions régionales. Maintenant charge à nous de maintenir cette confiance par notre travail et notre implication.

Plus particulièrement, comment ViaStella a intégré cette dimension numérique qui a éprouvé les médias traditionnels?

Les réseaux sociaux et le numérique en général représentent notre première antenne. Cependant nous devons relever un double défi. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, la télévision n’est pas morte. Les jeunes ne l’ont pas complètement délaissée. Selon un récent sondage Ipsos, les 16-30 ans quand ils veulent s’informer utilisent pour plus de la moitié la télévision. Nous devons donc alimenter notre offre avec une écriture à l’adresse de ces publics sans pour autant oublier les autres téléspectateurs. Parallèlement, nous devons être présents sur Internet avec là encore, une écriture moderne qui varie pour correspondre aux algorithmes évolutifs des réseaux sociaux et des moteurs de recherche. Nos méthodes sont donc en constante évolution pour alimenter nos antennes qu’elles soient numériques ou linéaires.

Durant votre carrière en tant que journaliste et présentateur du journal télévisé, vous avez eu l’occasion de travailler avec des personnalités qui ont marqué et façonné l’histoire de la chaîne. Que vous ont-elles appris et transmis ? 

On ne va pas les citer parce qu’il y en a beaucoup ! J’ai commencé en 2004 à France 3 Corse et elles m’ont transmis avant tout l’amour de cette entreprise et la passion du métier. Une passion partagée nourrie par une actualité riche, passionnante même si elle est souvent douloureuse. Sans cette passion, sans cet attachement à la Corse et à la chaîne, ViaStella n’aurait pas pu se développer comme elle l’a fait à travers l’information qui est sa colonne vertébrale mais aussi à travers l’ensemble de ses programmes.

Selon vous, l’exercice même du métier de journaliste est-il différent aujourd’hui d’il y a encore quelques années?
Il n’est pas différent puisqu’il consiste toujours à vérifier des faits, à en faire une information à la délivrer au plus grand nombre et à la rendre accessible, la vulgariser. Notre métier suppose aussi de décrypter, d’aller plus loin, d’aller voir ce qui se fait ailleurs pour comparer, questionner par exemple la gestion de certains problèmes économiques, politiques ou sociétaux. Après, il est évident que tout s’est accéléré. Aujourd’hui, l’antenne numérique émet 24h/24. C’est une approche qui ne doit pas nous pousser à précipiter les choses ou à entrer dans la course à l’information. Nous devons garder notre rigueur et nos réflexes journalistiques qui eux n’ont pas changé. Néanmoins, les nouveaux modes de consommation de l’information ont eu un impact sur la manière de travailler avec l’augmentation de l’offre d’information ou sur le terrain par exemple, avec la possibilité de faire des directs avec des moyens techniques réduits.

Comment définiriez-vous la ligne éditoriale de la rédaction de France 3 Corse ViaStella?
La rédaction doit être le miroir d’une société. Notre ligne éditoriale est simple: donner une information fiable, rester un média de référence, être en proximité avec nos publics. C’est pour toutes ces raisons que nous avons mis à l’antenne une série d’émissions en itinérance, en extérieur et en direct pour aller à la rencontre des téléspectateurs, que nous proposons des programmes thématiques avec les In Tantu à 18h40 du lundi au vendredi. C’est aussi le reflet de la société insulaire que deux langues cohabitent de manière assez naturelle sur notre antenne, soit dans des éditions bilingues, soit dans des éditions exclusivement en langue corse et à travers de nouveaux formats pour enrichir notre offre éditoriale. La rédaction compte treize journalistes issus du Diplôme d’université « journalisme, médias et corsophonie » mené en partenariat avec l’école de journalisme de Lille, l’Université de Corse et des médias insulaires. Cette formation nous a permis de renforcer notre offre d’information bilingue qui constitue un élément de notre politique éditoriale.

Informer en Corse est-ce plus difficile qu’ailleurs?
On nous oppose fréquemment l’argument de la microsociété qui serait une difficulté, c’est vrai mais selon moi, c’est autant une exigence qui s’impose à nous. Cette proximité nous oblige. Notre rigueur doit être plus grande puisque nous sommes en contact avec beaucoup d’acteurs qui sont susceptibles de faire l’actualité. On peut rencontrer au coin de la rue la personne qui a fait l’objet d’un reportage. Une erreur de notre part sera relevée dans la minute et je recevrai un coup de fil justifié en l’occurrence. La connaissance du tissu local, de son histoire, des problématiques et des dossiers est une richesse, un atout pour le journaliste. Mais il est certain qu’en cas de drame notamment le facteur humain a un effet dans le traitement de l’information. Pour autant les médias insulaires en général ont une offre éditoriale de qualité qui va au- delà de ce que proposent les autres régions.

Récemment de nouveaux visages sont apparus à l’antenne, qu’attendez-vous de cette jeune génération ?
L’avenir de la chaîne passe par cette nouvelle génération. Sans faire d’âgisme, il faut évidemment croiser les regards avec des gens d’expérience, la suite sera écrite par ceux qui commencent et se forment aujourd’hui à nos côtés dans l’esprit des pionniers de 82. Il faut conserver cet attachement à la chaîne et au territoire. Notre spécificité est d’être un média de service public. Dans un contexte changeant, fait de crises multiples, la place et l’existence d’un tel média sont plus que jamais essentielles. C’est à nous de transmettre aux plus jeunes cet état d’esprit, encore une fois cette exigence et cette rigueur pour que l’aventure continue.

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