Edito – dec 2016

La hotte de l’espoir

Par Jean Poletti

Et toi tu l’as vu le père noël ?  Oui. Il est partout.  Tel le marathonien  il court  d’une école à l’autre,  sillonne Bastia et Ajaccio. Et sacrifiant à la mode  se prête au jeu des selfies.  Dans une sorte d’atmosphère irréaliste et surannée, l’homme à la barbe blanche suscite un halo de quiétude. L’espace d’un instant les problèmes insulaires et l’anxiété ambiante semble mis sous le boisseau. Une sorte d’oubli bienfaisant, qui brise la morosité qui crucifie notre société.

Cette trêve des confiseurs recueille une grande adhésion. Elle fait mille émules, qui contre vents et marées, neige et frimas, veulent encore croire que le pire ne sera pas sûr.

Dans ce solstice d’hiver aux jours raccourcis, une lueur d’espoir irrationnelle et enfantine, s’installe dans les cœurs et les esprits. Eclaircie fugace ? Sans doute. Optimisme passager ? Vraisemblablement. Parenthèse enchantée ? Certainement. Comme dirait l’autre le rêve passe.

Pourtant au mépris de ce consensus de bon aloi, tels veulent garder les yeux bien ouverts. Ils savent que le bonhomme à la houppelande rouge est sempiternellement contesté par le père fouettard.  Celui  qui amène les remontrances et non les friandises.

Cette période est finalement le point d’orgue des postulations antagonistes qui assaillent la Corse. Pour certains la méthode Coué et l’optimisme béat.  Chez d’autres la lucidité et la claire conscience. Car le constat est rude.  Sans qu’il soit utile d’emprunter à Hugo et son célèbre voici venir l’hiver terreur des pauvres gens, nul ne disconviendra que notre île est dans une mauvaise passe. L’incantation, les artifices, les palliatifs de décembre ne suffiront pas à annihiler le marasme économique et les affres sociétales qui sacrifient une communauté. Et lui interdisent d’aborder sur les rivages du bonheur collectif.

Le miracle d’une nuit, que les croyants disent à nulle autre pareille, ne peut se reproduire, fusse dans une étable ou dans l’hémicycle territorial.

Le véritable progrès. Celui qui flétrit misère chômage et précarité passe par des voies qui contrairement à d’autres ne sont pas impénétrables. Elles obéissent à une logique politique au sens noble du terme. La nouvelle majorité s’est attelée sans réticence ni atermoiement à ce traîneau rempli de pesanteurs et de difficultés. Relever les défis. Voilà son cantique. Faire entrer de plain-pied la Corse dans la modernité et l’essor partagé. Telle doit être sa croyance. Un crédo forcément laïque, assurément sans dogmes. Car nul n’infirmera qu’en regard de la fragilité de cristal de notre région, le droit à l’erreur n’est pas permis.

Gilles Simeoni et les siens, mais au-delà tous ceux qui croient en l’avenir s’évertuent à pallier les lourds handicaps dont ils héritent et qui précipitèrent inexorablement, au gré des années, une île riche en potentialités en zone de misère.

La messe n’est pas dite.  Ici et là des gens affirment qu’un autre chemin est  non seulement souhaitable mais également possible.   Que le temps est venu de faire mentir Pasquale Paoli et son Corsica un averai mai bè.

Et si cette fois la magie de noël se conjuguait avec le pragmatisme d’une union sacrée des hommes de bonne volonté ? Alors oui, ce serait la naissance d’un nouveau destin pour un peuple qui n’a pas vocation à vivre éternellement dans les limbes de l’angoisse. Mais pourrait percevoir, à la lueur d’une petite flamme vacillante, ces lendemains qui chantent.

Quand tout va mal. Que les vents contraires veulent souffler les bougies d’un pâle espoir affirmons que le pire n’est jamais sûr. Osons dire dans ce droit fil, que sacré et profane peuvent et doivent se fondre dans un même creuset pour faire d’une célébration l’authentique couronnement d’une Corse qui gagne.

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