DE L’ART DE RÉSEAUTER

Cogiter ou travailler seul dans son coin ? Non merci. Alors que les Corses n’ont pas attendu pour investir les réseaux sociaux sur la Toile, ils socialisent également en réseau et dans la «vraie» vie. Une nouvelle manière de vivre son activité professionnelle mais pas seulement.

Par Caroline Ettori

Les réseaux en Corse ont toujours existé mais de manière beaucoup moins formelle ou en tout cas plus discrète. Les compétences et l’information ne se partageaient pas. Par habitude ou par crainte de se voir voler ou copier son savoir-faire. Autant dire qu’afficher le partage et l’échange comme mode de fonctionnement est plus qu’une révolution, amorcée par une nouvelle génération d’actifs et d’entrepreneurs. Parmi eux, les équipes de Communiti, réseau social et professionnel corse qui a décidé de casser l’écran pour organiser régulièrement des événements à caractère entrepreneurial sur l’ensemble du territoire ayant pour but d’aider les associations, entreprises et institutions à se rencontrer. Rendez-vous était donc donné le 5 décembre dernier à l’espace Empire Cowork à Ajaccio pour une Nuit des Réseaux organisée en partenariat avec la Capa M3E. L’objectif était de réunir les représentants des différents réseaux existants en Corse et les professionnels souhaitant intégrer une communauté.

En tout, près de 150 personnes ont pu se rencontrer après les prises de paroles, rapides et efficaces, orchestrées par Linda Gendre de la Capa M3E. Sur l’estrade ou dans la salle, les représentants de l’IAE Corse, du Medef, de l’EPA Corsica, des Corsican Business Women, de l’Ordre des Experts-Comptables, du Réseau des Télésecrétaires de Corse, de Pôle Emploi/Club des RH ou encore de la CCI de Corse-du-Sud, de la CGPME et de Corsica Diaspora ont pu présenter leur réseau. Et enrichir le carnet d’adresses des participants. « Chacun de ses réseaux a des objectifs bien définis et tous sont complémentaires. Ils sont là pour aider. Il ne faut pas avoir peur d’aller les rencontrer », note le fondateur de Communiti Robert Menasse. Pourtant, le réseau est-il en passe de devenir la nouvelle tarte à la crème du monde du travail ? Qu’est-ce qui différencie un réseau, d’un syndicat ou d’une corporation ? « Le maître-mot ici c’est la transversalité. Il est important aujourd’hui de créer des passerelles, des synergies y compris dans ce type de réseaux où l’on trouve des compétences très spécifiques. Il s’agit d’aborder une dynamique de projets pour faire mieux ensemble. Sur ce point, les mentalités ont vraiment évolué. Même si le résultat n’est pas celui attendu au départ, il en ressortira toujours quelque chose. C’est une approche plus anglo-saxonne. »

Une spécificité corse

Vice-présidente en charge du développement économique et du numérique au sein du Pays ajaccien, Marie-Antoinette Santoni-Brunelli analyse la tendance et la plus-value de la mise en réseaux. « Le tissu économique en Corse est essentiellement constitué de TPE. Souvent il s’agit de personnes qui travaillent seules dans leur entreprise et qui n’ont pas forcément les moyens ou le temps d’échanger avec d’autres professionnels. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous avons créé la M3E. Pour les accompagner dans leur parcours du combattant et briser l’isolement. En parallèle, le développement des réseaux sociaux en ligne permet de faire connaissance, de nouer des contacts mais cela reste de l’ordre du virtuel. Ce type de manifestation est l’occasion de sortir de son entreprise et de faire connaissance, retrouver le côté humain du monde professionnel. Le but est toujours de s’ouvrir, de mutualiser les activités dans une démarche de partenariat. C’est d’ailleurs ce qu’ont fait les Corsican Business Women qui ont fait de leurs problématiques communes, un véritable point d’ancrage de leur réseau. »

Autre initiative féminine, le réseau des télésecrétaires de Corse animée par Patricia Colombani Richard. « Notre structure a pour objectif de servir d’interface entre les chefs d’entreprises et les télésecrétaires privées ou indépendantes. Beaucoup de dirigeants n’ont pas les moyens de créer un poste administratif, poste pourtant indispensable pour le bon fonctionnement de l’entreprise. Nous leur proposons ainsi des services et des compétences et nos membres, une quinzaine en moyenne, peuvent s’entraider et se relayer en cas de difficultés. » Pour la présidente, la présence du réseau à cet événement était indispensable : « Si nous sommes un vrai plus pour l’entreprise, trop peu de gens nous connaissent. Il était essentiel pour nous de participer à cette soirée afin de nous présenter aux professionnels et aux autres réseaux. »

 

Des chefs d’entreprises, des indépendants, des étudiants et des tout jeunes actifs avaient envie de réseauter à l’instar de Raphaël Casentini. Diplômé de la Kedge Business School de Bordeaux, il a adhéré à Communiti dès son lancement en 2016, un « réseau international, de qualité et surtout de confiance ». « Après une année scolaire passée à l’étranger entre la Thaïlande et le Mexique, j’ai trouvé mon stage de fin d’études à Ajaccio au sein d’ACG Management, une société de fonds d’investissement, grâce au réseau. Ce soir, je suis venu pour rencontrer d’autres personnes qui, comme moi, ont trouvé un stage ou un emploi via les réseaux mais aussi pour discuter avec des professionnels. C’est toujours intéressant de parler avec des gens qui entreprennent et qui collaborent pour faire progresser les autres. Et la Corse. », conclut celui qui souhaite éprouver ses compétences en stratégie d’entreprise à l’étranger. Avant de mieux revenir bien sûr.

Les commentaires sont fermés, mais trackbacks Et les pingbacks sont ouverts.