Francesca Luciani :

La passion est dans le pré

À 24 ans, Francesca Luciani suit un parcours peu commun pour une jeune fille de son âge, elle est étudiante en BTS « Productions animales » au lycée agricole Terre nouvelleen Lozère. À l’heure où les agriculteurs lancent plusieurs signaux de détresse, et se demandent s’ils ont encore un avenir, elle nous parle avec enthousiasme et passion de son attachement à une agriculture raisonnable, adaptée au territoire et respectueuse de l’environnement. Consciente des difficultés de ce secteur, elle reste convaincue de ses choix à la fois professionnels et personnels et persuadée que les actuelles manifestations de désespoir cachent la réalité d’une agriculture en mutation qui peut engranger des réussites.

Portrait d’une actrice du monde rural de demain.

Francesca, d’où venez-vous ? Quel parcours vous a conduite à poursuivre vos études en BTS « Productions animales » ?

Je suis originaire de Corte par ma mère et du Niolu (Poghju di Lozzi) par mon père.

Mes grands-parents étaient éleveurs, mon oncle et ma tante le sont encore aujourd’hui et mon père est ingénieur agronome. C’était un peu comme une évidence de poursuivre dans le domaine de l’agriculture et surtout dans celui de l’élevage. Pourtant après mon bac série S, je me suis orientée vers une licence d’espagnol que j’ai obtenue avec l’idée de devenir professeur. Mais très vite, je me suis aperçue que l’enseignement est une affaire de vocation et que visiblement je ne l’avais pas…

Je me suis donc réorientée vers la seule voie qui correspondait à mes aspirations, celle de l’agriculture. J’ai passé un brevet professionnel de responsable d’exploitation au lycée agricole de Borgo avec l’intention de m’installer sur l’exploitation familiale. Après cette formation, je me suis rendue compte que j’avais besoin d’en apprendre plus pour pouvoir aller au bout de mon projet, d’où ma décision de poursuivre mon cursus. J’ai donc intégré un BTS « Productions animales » au lycée agricole Terre Nouvelle en Lozère.

Avez-vous l’intention de revenir travailler en Corse ?

J’espère pouvoir oui ! Mais ma formation est loin d’être terminée, j’aimerais faire une licence professionnelle et travailler au côté d’un éleveur comme technicienne afin de parfaire mon expérience avant de pouvoir moi-même rentrer en Corse et installer ma propre exploitation.

Vous participez avec votre établissement au Trophée national des lycées agricoles, en quoi consiste ce projet ?

Le TNLA est un Trophée qui rassemble plusieurs établissements agricoles français mais aussi étrangers pendant une semaine lors du Salon de l’Agriculture à Paris qui aura lieu en février 2020.

Pour mon équipe et moi-même, c’est un véritable défi de participer à ce genre d’événement.

Notre challenge consiste au dressage et à la préparation d’une vache. Cette dernière se prénomme Heureuse, elle nous accompagne pendant notre séjour.

Plusieurs épreuves sont notées pendant le Trophée : la manipulation de bovin sur le grand ring, la présentation de l’établissement, la communication sur les réseaux sociaux, la création d’affiche, le comportement pendant le salon tout en respectant le bien-être de l’animal.

Nous avons créé des pages sur les différents réseaux sociaux sur lesquelles nous voulons valoriser l’agriculture qui est proche de nous, c’est-à-dire une agriculture raisonnable, conduite sur des zones de montagne et qui entre dans une démarche de signes officiels de qualité et d’origine. C’est une grande fierté pour nous de pouvoir présenter Heureuse, qui représente une filière de qualité issue d’un territoire préservé.

Quel est votre jeune regard sur l’agriculture insulaire ?

L’agriculture corse a énormément de potentiel, avec des races insulaires qui sont adaptées à leur environnement et qui permettent de produire des produits de qualité reconnus au niveau national.

Quel est votre meilleur souvenir d’enfant au milieu d’une exploitation agricole ?

Je crois que je devais avoir 6 ou 7 ans, c’était la période des mises-bas et j’étais allée voir les brebis le soir avec ma tante. J’avais récupéré un agneau, tout juste né et je l’avais ramené à la bergerie dans mes bras. De voir tous ces agneaux partout, surveiller qu’ils tètent bien et les voir grandir, je pense que c’est à ce moment-là qu’est née ma passion.

Quels conseils donneriez-vous à un jeune qui souhaiterait s’installer comme exploitant agricole ?

Aujourd’hui, un responsable d’exploitation doit être un véritable chef d’entreprise qui a plusieurs cordes à son arc. Il faut pouvoir maîtriser la conduite générale du troupeau, tout le volet administratif et la commercialisation. C’est une grande charge de travail, il faut bien s’entourer et ne pas avoir froid aux yeux.

En plus, il faut aller voir d’autres exploitations, que ce soit sur le continent ou en Corse, de façon à pouvoir juger ce qui est intéressant dans le fonctionnement et ce qui l’est moins, pour éviter de faire les mêmes erreurs.

De quoi êtes-vous la plus fière ?

Je crois que c’est le Prix de la Meilleure Jeune Bergère 2019 que j’ai obtenu lors des ovinpiades départementales cette année.

Les ovinpiades est un concours qui s’articule autour des brebis, il y a une partie théorique (alimentation, sanitaire, reproduction, race…) et une partie manipulation (parage, état de santé, manipulation d’agneaux…). Je suis fière d’être reconnue à travers mon travail, mon métier, ma passion

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