Zia Zinzin

de Caroline Nasica

aux éditions Dargaud

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Par Karine Casalta

Un retour en Corse haut en couleur

« Dernier tour de clé, valise à la main : Caro quitte son appartement sans regrets. Elle vient de larguer son mec, une fois de plus, et cette fois, c’est la dernière. Direction la Corse, son île natale, où chaque pierre, chaque village porte en lui les souvenirs de l’enfance. Mais si les paysages restent intacts, le temps, lui, a laissé son empreinte : les anciens ont vieilli, les maisons changent de mains, les étrangers investissent les villages sans toujours en comprendre l’âme. »

Avec Zia Zinzin, Caroline Nasica signe une nouvelle bande dessinée inspirée de son histoire familiale et nous entraîne dans un retour aux sources à la fois tendre et mordant. À travers le prisme de sa famille – et notamment de cette tante fantasque qui donne son titre au livre –, elle explore le poids des traditions, la transmission et les liens indéfectibles qui nous rattachent à nos racines. Mais derrière les rires et les anecdotes pleines d’humour, l’autrice n’élude pas les aspects plus sombres de l’île : la solitude, l’alcool, les tensions qui gangrènent parfois les relations.

Le trait hyper-dynamique et expressif de Caroline Nasica, déjà remarqué dans Caro et les Zinzins, insuffle une énergie communicative à cette bande dessinée. Les personnages, hauts en couleur, se débattent avec leurs contradictions, oscillant entre nostalgie et modernité. Et lorsque les dernières pages s’ouvrent sur la nature corse dans toute sa splendeur, elles laissent entrevoir un avenir où tout semble encore possible…

Caroline Nasica a grandi dans le sud, à Marseille et à Nice puis à Tox en Corse. Passionnée de bande dessinée et d’illustration, elle se forme à l’École professionnelle supérieure d’arts graphiques et d’architecture à Paris, avant de devenir directrice artistique en communication visuelle et multimédia. En 2020, elle relance son activité de dessin sur Instagram sous l’alias @zinzin_nsc, où elle partage des anecdotes avec humour et dérision. Cela aboutit à la parution de Caro et les Zinzins en 2021, suivi d’un second tome en 2022. En 2023, elle publie sa première fiction 5, rue du Boucan, et coréalise Pop-porn : le porno, c’est pas la vraie vie !en 2024. Avec Zia Zinzin, elle nous invite à découvrir sa famille haute en couleur en Corse.

Intervista

Comment est née l’idée de Zia Zinzin ?

À un repas de famille, pendant qu’une de mes taties nous racontait encore une histoire incroyable et beaucoup trop longue. À la base je comptais retranscrire uniquement leurs récits, puis dans une sorte de logique, j’en ai créé tout un récit qui se déroule en été, y entremêlant mes souvenirs et les leurs. 

Votre bande dessinée parle de transmission et d’héritage culturel. Quel regard portez-vous aujourd’hui sur votre propre héritage familial et culturel ?

Question compliquée, et c’est bien pour ça que j’en ai fait une BD de 200 pages. Je pense que j’ai de la chance que la génération de mes grands-parents soit encore en vie pour me transmettre le maximum de choses, que j’essaie du mieux que je peux de garder en moi, pour pouvoir à mon tour les transmettre, et par là les soulager par le fait de se dire que tout n’est pas perdu. La seule chose à retenir, c’est que je suis fière d’avoir cet héritage culturel. 

Y a-t-il un souvenir d’enfance/ une tradition auquel /à laquelle vous êtes particulièrement attachée ? 

Chercher les amandes au fond du jardin de ma Zia.

La Corse est au cœur de votre récit. Qu’est-ce qui vous a incitée à aborder la question du changement de l’île ? Est-ce que son évolution vous préoccupe ?

Je parle de la Corse car elle fait partie de moi, c’est le récit le plus intime que je n’ai jamais écrit, mais c’était d’abord par souci d’immortaliser les choses qui me sont chères, une façon d’empêcher une génération de partir. C’est plus l’évolution de l’île dans le regard des anciens de ma famille qui m’inquiète, parce que je ne l’ai pas vécu comme eux, et eux voient vraiment la différence, les villages qui se désertent, la langue et les traditions qui se perdent…

L’humour est omniprésent dans vos œuvres. Est-ce un moyen de prendre du recul sur des problématiques bien réelles ?

Dans ma vie de tous les jours, c’est également avec l’humour que j’essaie d’aborder certains sujets, je déteste tomber dans le mélodrame ou le pathos. Alors, en dessin, l’autodérision et l’humour sont ma façon de parler de toutde manière plus légère, pour mieux faire passer la pilule. Dans ce livre, bien qu’en 200 pages je n’ai pas pu aborder tous les sujets que je voulais, ceux que j’ai pu balayer ne sont pas tous marrants, mais je pense qu’il est pour la plupart nécessaire d’en parler, et l’humour nous permet de le faire avec plus de légèreté.

Votre dessin est très expressif, presque caricatural. Comment travaillez-vous sur la mise en scène des personnages ?

C’est très spontané, je ne peux pas rester 4 heures sur une case ! Pour la plupart, je les avais tous en tête car c’est une autofiction, donc autant dire que je n’ai pas inventé grand-chose, et bien que je n’aime pas trop les clichés, il y a souvent beaucoup de vrai en eux. On est méditerranéen, on s’exprime en parlant, en criant mais avec beaucoup de communication non verbale, et donc évidemment les expressions sont importantes.

De manière plus générale, qu’est-ce qui vous incite à prendre la plume ?

Un besoin de témoigner, l’urgence de laisser une trace. Prendre la plume c’est comme une thérapie pour moi, je lâche ce que j’ai sur le cœur, ce qui me pèse, ce qui me plaît. Depuis le départ, le dessin et l’écriture ont toujours été salutaires pour moi.

Ce qu’il y a de très corse en vous ?

Le lien que j’entretiens avec ma famille. Avec mes anciens.

Un lieu qui vous ressemble ?

Marseille, la ville des Corses. Éclectique, bouillante, avec des zinzins de partout. Et jamais très loin de l’île.

Après Zia Zinzin, avez-vous déjà d’autres projets en préparation ?

Cette BD m’a pris beaucoup d’énergie, et j’en suis fière, mais j’ai envie de faire une petite pause dessin pour me diriger vers le cinéma, mon autre rêve d’enfance, que j’ai un peu trop laisser de côté. Et puis une BD, ça fait un bon storyboard pour un film !

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