Onde de choc de la crise institutionnelle
Déjà fragile, l’économie insulaire frappée au cœur
La Corse ne brillait pas par la vigueur entrepreneuriale et salariale. La nébuleuse élyséenne et gouvernementale aggrave encore la situation. Ici aussi la consommation se rétracte, ceux qui le peuvent font un bas de laine, une majorité rogne sur les dépenses. Artisanat et commerce souffrent comme jamais. Dans un effet boule de neige la situation d’une communauté déjà sur un chemin de crête risque de dévisser.
Par Jean Poletti
Tout ou presque a été dit et ressassé sur la vacuité du pouvoir présidentiel et parlementaire. À de rares exceptions près se joua la partition du sauve-qui-peut, afin de tenter de préserver des acquis. Assimilant dans l’opinion les mandats électoraux en rentes. Sans parler de ceux qui brûlent les vaisseaux dont ils furent commandants en second afin de ne pas hypothéquer leurs chances, fussent-elles minimes, à la présidentielle. Dans ce combat de petits chefs de partis, la seule doctrine semble consister à fuir comme la peste un président démonétisé. Isolé dans sa solitude, qui n’est pas splendide, mais confinerait au vaudeville s’il ne s’agissait pas de redresser un pays. Pourtant celui qui a transformé l’Élysée en bunker semble étranger au légitime procès qui lui est fait par le peuple. En majesté, il présida impassible dans la tourmente à l’entrée au Panthéon de Robert Badinter rejoignant les illustres fils de la République. Ne fit-il pas à cet égard une introspection silencieuse en comparant son filandreux parcours avec celui de Jean Jaurès, Jean Moulin, André Malraux et tant d’autres qui au-delà de leurs différences furent d’insignes serviteurs de la France ? Ne perçut-il pas ce souffle d’outre-tombe émanant de personnages qui apportèrent leur pierre à l’édifice d’une société plus juste sans se préoccuper de leurs carrières ? Sans doute pas.
La démocratie lacérée
D’ailleurs en plein tumulte hexagonal qu’il provoqua, ce président sans pouvoir s’envola pour l’Égypte pour « soutenir la mise en œuvre du plan de paix ». Sans être disgracieuses, maintes voix s’élevèrent pour dire qu’il alla jouer les utilités et paraître sur les photos d’un épilogue dont il ne fut en rien associé, sauf à invectiver Israël à la grande joie du Hamas terroriste. Une présence dont se gaussa Trump « J’ai du mal croire que tu fais profil bas. » Une ironie qui révèle la perte de crédibilité du chef de l’État sur la scène internationale, qui se veut son domaine de prédilection.
Ces quelques digressions suffisent à fixer les esprits sur l’attitude qui prévaut dans les allées du pouvoir et les formations dites de gouvernement. Elle est à tout le moins en flagrante opposition avec le peuple dont ils devraient pourtant être les représentants et partant à son écoute.
La folle période qui s’est ouverte avec Michel Barnier, puis François Bayrou et Sébastien Lecornu ne se refermera pas de sitôt. Quel que soit le résultat, proche ou plus lointain, la perte de confiance avec la classe politique, dite de l’arc républicain relève l’évidence, en tant que telle incontournable. Il est vrai que demander aux citoyens de se serrer la ceinture sans dire qui porte la responsabilité d’un endettement de quelque trois mille quatre cents milliards d’euros relève de la fumisterie. Tout comme l’est celle de rechigner à dire clairement si l’effort sera réparti équitablement. Pour être clair indiquer si les grands capitaines de l’industrie, qui bénéficièrent en espèces sonnantes et trébuchantes de la politique de l’offre et son mirage du ruissellement, ou abusèrent de l’optimisation fiscale, apporteront leur écot à la hauteur de leurs richesses.
La région terrassée
Devant ces murs bâtis par la dette et les expectatives un pays est terrassé par une profonde inquiétude. Certaines régions mieux loties sentiront passer le vent du boulet, d’autres le prendront de plein fouet. Et singulièrement la Corse. Ayant déjà la fragilité du cristal, elle subira le ressac d’une situation qu’elle ne pourra pas maîtriser. Victime par procuration.
En effet, la sacro-sainte solidarité nationale pourrait malheureusement pâtir de réductions budgétaires. On pense notamment aux cinquante millions supplémentaires liés à la continuité territoriale. Sans elle, le service public des transports entrerait dans une zone de grandes turbulences. Dans ce droit fil, les collectivités locales ou territoriales et les intercommunalités pourraient-elles aussi subir ce que l’on nomme un rabotage supplémentaire. Éclipsant ainsi tout investissement non seulement souhaitable mais nécessaire tant sur le littoral que dans l’intérieur. Les besoins sont criants qu’il s’agisse de petites opérations communales pour fixer les populations, de la construction de logements sociaux tellement déficitaires. Ou encore d’édifications de barrages hydrauliques afin de pallier aux sévères sécheresses telles que celles qui actuellement frappent l’extrême-sud.
Requiem commercial
Ce tableau indique mieux que longs discours que notre île, qui accuse encore et toujours des retards d’investissements publics, n’est pas à l’aube d’un bienfaisant renouveau. Pis tous les ingrédients financiers qui s’ébauchent à Paris laissent présager du contraire.
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