Mario Stasi DÉFENSEUR de L’UNIVERSALISME RÉPUBLICAIN

DEPUIS PRESQUE SEPT ANS, MARIO STASI PRÉSIDE
AUX ACTIONS DE LA LICRA, LIGUE INTERNATIONALE CONTRE LE RACISME ET L’ANTISÉMITISME, QUI FAIT AUTORITÉ DANS CE DOMAINE. DEPUIS SON ÉLECTION, IL A DÛ AFFRONTER DES DÉFIS GRANDISSANTS POUR PROMOUVOIR
LA TOLÉRANCE DANS UNE SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PLUS EN PLUS FRACTURÉE PAR DES DÉBATS SUR L’IDENTITÉ NATIONALE, LA LAÏCITÉ, ET LA MONTÉE DES EXTRÉMISMES ET LE COMMUNAUTARISME. UN TRAVAIL PLUS QUE JAMAIS NÉCESSAIRE AUJOURD’HUI, AU REGARD DU CONTEXTE ACTUEL MARQUÉ PAR LA GUERRE ENTRE ISRAËL ET LE HAMAS, ET LA FLAMBÉE DES ACTES ANTISÉMITES.

Par Karine Casalta

Le conflit entre Israël et le Hamas survient en France dans un contexte sociétal déjà tendu, et a déclenché de vives réactions et une prolifération d’actes antisémites inédite depuis la Seconde Guerre mondiale. Devant le déferlement de propos haineux qui sont à déplorer, les actions de la Licra pour les contrer et lutter contre ceux qui les portent, revêtent plus que jamais une importance cruciale. Un combat politique, éthique et républicain indispensable pour Mario Stasi, son président.

HOMME DE CONVICTION
Né en 1968, cet ardent défenseur des droits de l’homme, de la tolérance et de la justice sociale n’a eu de cesse depuis son élection de travailler à sensibiliser le public aux problèmes liés aux discriminations, à promouvoir l’éducation à la tolérance et à défendre les droits des victimes. Avocat pénaliste de formation, Mario Stasi a démarré sa carrière professionnelle auprès du célèbre pénaliste Olivier Metzner avant de s’associer à son père, lui- même avocat puis de fonder par la suite avec Sophie Obadia, le cabinet Obadia & Stasi. Dans le même temps, tenté par l’aventure politique, il débute son parcours militant dans les années 90 au sein du mouvement centriste CDS puis UDF. Plusieurs fois candidat, notamment aux élections municipales en 2001 à Paris en tant que tête de liste de Philippe Seguin dans le 3e arrondissement, il s’engage par la suite aux côtés de François Bayrou jusqu’à la campagne présidentielle de 2007. Homme de conviction, avec un sens de l’engagement public chevillé au corps, il rejoint la Licra en 2008 pour se consacrer à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme, et toutes les discriminations. En tant que simple avocat tout d’abord, pour défendre et assister les victimes partout en France, puis en tant que responsable de la commission juridique par la suite. Élu au poste de premier vice-président en 2016, il devient statutairement président de l’organisation en novembre 2017 après la démission de son prédécesseur Alain Jakubowicz, et sera successivement réélu, sans quelconque opposition en 2019 et 2022. Un engagement totalement bénévole, «qui, dit-il, prend une vraie part de mon existence et de ma vie» et qu’il mène de front avec sa profession d’avocat. Une profession qui l’a d’ailleurs souvent conduit en Corse. Il y retrouve ses origines (par son arrière-grand-mère bastiaise), et ses souvenirs heureux de camping en famille, dans la vallée de l’Asco et à Piana.

L’ENGAGEMENT PUBLIC, UNE AFFAIRE DE FAMILLE
Ce goût de l’engagement fait partie de son ADN «Cela fait partie de mon identité et de ce qui m’a construit. Il y a la musique classique, la musique française, la montagne, et l’engagement public: mon père, Mario Stasi, ancien bâtonnier de Paris, a été un des premiers avocats à défendre les dissidents de Pinochet, allant là-bas en 1974 pour Avocats Sans Frontières et a été président des avocats francophones. Mon oncle, Bernard Stasi – figure du parti centriste – a été ministre, mon autre oncle était adjoint au maire de Reims, il y a toujours ce souci et ce désir d’œuvrer pour les autres. Trois frères qui ont choisi la nationalité française, alors qu’ils étaient franco-espagnols, issus d’une famille d’origine italienne installée en Espagne, qui a immigré en France pour des raisons économiques dans les années 30. Ils ont fait le choix de la République et de la France, et ont toujours été très attachés à ses valeurs. Cet engagement public est sans doute une certaine façon de rendre ce qui leur avait été donné de vivre. » C’est donc pétri de ces valeurs que Mario Stasi a pris les rênes de la Licra. Il s’est dès lors engagé en tant que président de l’organisation dans de nombreuses campagnes et initiatives visant à sensibiliser le public et à promouvoir la diversité, la compréhension interculturelle et l’égalité, faisant de la lutte contre toute forme de discrimination son cheval de bataille.

S’attachant aussi, pour promouvoir ces valeurs universalistes, à combattre l’ignorance. L’organisation intervient ainsi dans les classes, d’écoles, collèges et lycées, pour expliquer notamment la signification des mots «raciste», «antisémitisme», «négationnisme», «génocide». Car ces maux se combattent aussi par la connaissance et la prise de conscience de ce qu’ils représentent.

Un combat au long cours 

Des actions malheureusement encore et toujours nécessaires devant la résurgence de l’antisémitisme, en nette augmentation depuis l’attaque terroriste du Hamas en Israël le 7 octobre dernier. « Au travers des quarante sections de la Licra, qui recueillent les signalements et prennent en charge les victimes, nous constatons très nettement une prolifération des actes et propos antisémites très inquiétante. Nous avons depuis le 7 octobre, plus de trois fois plus de signalements que nous n’en avons eus sur l’ensemble de l’année 2022. En réponse, nous avons une trentaine d’avocats, organisés en équipe, qui traitent de tous ces signalements et les notifient au titre du code 40 de procédure pénale au procureur, en lui demandant de poursuivre. Et nous intervenons aussi parfois directement aux côtés de victimes, nous joignant à leur plainte, comme dans ce cas récent, où, à la demande de l’avocat d’une plaignante dont les deux enfants ont été pris en otage par le Hamas, nous nous sommes joints à sa plainte, tel que le prévoit nos statuts, pour crime contre l’humanité.» Et de souligner que si l’État a parfaitement qualifié et sans ambiguïté les attaques terroristes du 7 octobre, et que la marche du 12 novembre a eu le mérite de montrer à la communauté juive qu’elle n’était pas seule et isolée, il y a urgence maintenant à passer aux actes pour promouvoir le pacte républicain.

Après la marche les démarches 

« Je milite ainsi pour l’instauration de ce que la lutte contre le racisme et l’antisémitisme devienne une grande cause nationale, avec une déclinaison de cette cause par des plans locaux concrets de lutte contre le racisme et la discrimination, mettant en jeu les maires, les associations des maires de France, etc. Pour que partout sur notre territoire, il y ait, ce qui existe déjà, mais à faible échelle puisqu’il y en a six seulement, des plans locaux de lutte contre le racisme et les discriminations. Où le maire, sur trois ans, réunit les associations locales et nationales et définit un plan d’actions mémorielle, éducative, sportive, culturelle, s’intéressant aux citoyens et aux plus jeunes, pour que la vie de la municipalité s’organise autour de ces valeurs-là. Il faut non seulement une prise de conscience, mais aussi et c’est très important, une mise en pratique avec un renforcement des moyens humains et financiers pour que les intervenants soient le plus nombreux à se rendre au contact de la jeunesse et ce dès le plus jeune âge, en soutien ou à la place des professeurs qui ne peuvent pas tout faire. Nous avons déjà dans ce sens à la Licra, un partenariat avec l’Éducation nationale, et dans le domaine du sport, gangréné par un prosélytisme identitaire et religieux parfois constaté, avec la ligue de football et d’autres institutions. Car au-delà d’un simple travail de vigilance et de dénonciation le vrai souci de la Licra est d’éduquer ! 

Il faut pour cela un vrai travail de moyen et long terme, qui ne se satisfasse pas des grandes déclarations de principe sur les valeurs de la République, mais continue par la mise en pratique de ces valeurs partout en France. Et l’impulsion doit être donnée par le politique. » Aspirant à jouer un rôle actif dans cette mise en œuvre, Mario Stasi a eu plusieurs entretiens, avec la Première ministre Elisabeth Borne, avec Bérangère Couillard, ministre de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Égalité des chances, ou encore avec le délégué interministériel dans la lutte contre le racisme et l’antisémitisme, visant à élaborer ce plan d’action.

Un combat pour la République qui passe aussi par l’implication de tous les acteurs de la vie civile, appelés à contribuer pour que chacun ait, dit-il, « la chance de devenir un citoyen libre et éclairé ».

Le communautarisme cancer de l’universalisme

Dans cet objectif, la Licra collabore aussi régulièrement avec toutes les associations partageant des objectifs similaires et la promotion des valeurs universalistes. « On travaille intelligemment et en bon compagnonnage avec le Crif, l’UEJF, j’ai des relations également avec le recteur de la Grande Mosquée de Paris. Je sais sa situation compliquée, je regrette néanmoins ses choix depuis le 7 octobre ; je dois dire que depuis l’attaque terroriste du 7 octobre, chacun a dû se positionner, et dans ce positionnement, je n’ai pas eu beaucoup de relations avec les autres associations telles que la Ligue des droits de l’homme, le MRAP, et même SOS racisme.  Ces dernières ayant en effet adopté une approche communautaire plutôt qu’universaliste, exacerbant les tensions entre les divers groupes, causant parfois des dérives dans le débat public. » Il souligne ainsi les césures qui ont fait surface au grand jour entre deux camps, entre ceux qui considèrent le Hamas comme un mouvement de résistance, jugeant la réplique d’Israël comme un massacre génocidaire, et les autres qui considèrent le droit d’Israël à se défendre et la nécessité vitale de lutter contre un groupe terroriste.

Un combat plus que jamais nécessaire sur la toile

Une différence qui se répand aussi sur les réseaux sociaux, devenus pour certains déplore-t-il, de véritables déversoirs de haine – « les réseaux sociaux sont des accélérateurs de particules haineuses » – particulièrement X (ex Twitter) qui ne compte que très peu de modérateurs en langue française. « On s’est toujours battu et nous continuerons à nous battre pour une régulation réelle et efficace des réseaux sociaux. La liberté d’expression ne permet pas tout, le racisme et l’antisémitisme ne sont pas des opinions, ce sont clairement des délits. Tout ce qui est interdit par la Convention européenne des droits de l’homme, la Cour européenne des droits de l’homme, la loi de 1972 contre le racisme dans notre bloc de constitutionalité n’a pas à se retrouver sur les réseaux sociaux ! Les hébergeurs doivent être tenus responsables de ce qui est publié sur leur site. Une régulation plus ferme et rapide, c’est ce à quoi nous travaillons. »

Lucide sur la gravité de la situation actuelle, Mario Stasi se dit d’un « optimisme lucide » qui ne se laisse jamais abattre devant les tâches à accomplir, que ce soit dans son travail d’avocat ou avec la Licra, qui mène, dit-il, « une lutte de chaque instant pour veiller à ce que cette République ne vacille pas vers un extrémisme ou vers un autre ». L’association peut en tout cas compter sur le dévouement inébranlable de son président pour défendre cet idéal universaliste et républicain. 

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