L’Università à u serviziu di a Corsica è di u so sviluppu…

Le rôle des universités est de former les acteurs de demain, de peaufiner leur éducation, elle a pour rôle d’instruire et de construire avec eux l’avenir. Les différentes filières qu’elle propose doivent répondre aux besoins du lieu où elle est implantée. 

Par Vannina Angelini-Buresi 

De qui ? De quoi a-t-on besoin ici ? Stratégiquement que doit-on développer ? Quelle richesse doit-on valoriser pour qu’individuellement, communément voire institutionnellement nous puissions créer et contribuer au développement d’une économie qui corresponde au territoire. Un territoire qui entre les CNRS (Centre national de la recherche scientifique), les UMR (unités mixtes de recherche) et les universités, chercheurs, enseignants chercheurs, sont là pour apporter savoir et fruits de leurs recherches pour qu’ainsi d’éventuelles mesures soient mises en place au bon fonctionnement des sociétés. Ces travaux doivent tenir compte de leur histoire, leur territoire et particularités. 

L’identité du lieu est souvent mise en exergue tant on ne peut s’en détacher dans la continuité de ce qui a été fait et de ce qui reste à faire. Connaître son passé, l’avoir étudié, acquis pour mieux vivre le présent et appréhender l’avenir. C’est ce que s’évertue de faire l’université de Corti, en rejoignant depuis peu la communauté des chaires Unesco.

Ce que l’université de Corse produit comme travail depuis sa réouverture est enrichi chaque année. Elle doit comme elle le fait constituer la future force vive économique de la Corse. Son unité de recherche l’UMR LISA, laboratoire en sciences humaines et sociales (Unité mixte de recherche, Lieux, identités eSpaces, activités) sous la direction d’Eugène Gherardi, spécialiste de cultures et langues régionales, travaille conjointement avec le CNRS et leurs nombreux chercheurs de façon à répondre à certains questionnements tant sociétales que sociaux, humains et scientifiques.

Plaidoyer d’avenir 

L’objet de leurs travaux doit pouvoir apporter des solutions mais le plus souvent anticiper et agir en fonction.

L’Unesco ? Il est représenté en tant que laboratoire d’idée et met évidemment beaucoup d’importance au niveau de la recherche. Pour l’Università, c’est un honneur de rejoindre ces chaires Unesco sur la littératie des futurs. Elles sont aujourd’hui 37 dans différentes universités renommées. Et sont quelque 900 disséminées dans le monde. 

Cette chaire Unesco en littératie des futurs « Devenirs en Méditerranée » a pour objectif d’améliorer la capacité des individus, des communautés et des institutions à utiliser l’avenir en utilisant des systèmes d’anticipation. L’université de Corse travaille sur ces enjeux et a saisi l’opportunité d’intégrer cette chaire. Elle a été inaugurée à l’Università di Corti en présence de personnalités. Sébastien Quenot s’implique depuis 2020 sur ce projet qui se réalise enfin. Il en est aujourd’hui le responsable avec Caroline Tafani, maître de conférence et habilitée à diriger des recherches en géographie. Le projet de l’Unesco correspond aux valeurs de l’Université et plus largement à celle de la Corse consistant à valoriser l’éducation et le savoir. L’Unesco, faut-il le préciser, est une institution internationale liée à l’ONU. Cette idée d’anticiper les futurs avec l’obtention de cette chaire correspondait également aux objectifs et préoccupations de l’Università de Corti.

Et Sébastien Quenot d’expliciter : « nous travaillons sur des enjeux tournés vers la Méditerranée, en lien avec ce que nous faisions déjà, tout en intégrant le réseau des chaires en littératie des futurs. Tout en sachant que le futur sera à jamais imprévisible, il s’agit en réalité de travailler nos compétences d’anticipation. Nous pouvons alors essayer de reconstruire la généalogie de nos représentations. Pourquoi pensons-nous de telle ou telle manière ? De son côté, la prospective, qui est devenue une discipline à part entière, essaie d’élaborer des scénarios ». Dans un souci de fixer les esprits, il précise : « Notre démarche est différente, elle ne se limite pas à une poignée de spécialistes. Elle essaie de travailler les sciences avec et pour la société en organisant des labs d’une à deux journées sur des thématiques différentes. Ainsi des citoyens réfléchissent ensemble au futur de la culture (juin 2022), de l’agriculture (17 mars 2023), au futur de la langue (20 juin 2023). Et bien d’autres interrogations socialement vives, pour confronter les futurs probables avec nos futurs souhaitables. »

Objectifs et enjeux pour notre territoire

Pour Sébastien Quenot nul doute n’est de mise. « Le pari, c’est de faire en sorte qu’en sortant de là, les idées changent et que chacun mesure ce qu’il peut apporter. En ce sens, c’est une science engagée, transformative. » Il énumère une évidence. « La Méditerranée qui subit de fortes pressions anthropiques a besoin de nous. N’est-elle pas un “récit en quête de narrateur ?”  Lieux de créations de cinq alphabets et de dizaines de langues, elle a été l’objet de confrontation des récits et des narrateurs pour la détention du monopole de l’histoire. Elle nous oblige à cultiver une praxis de la relation complexe. La première personne du pluriel mêle l’espace et les temps/l’étant. Elle opère une superposition des temps et des lieux alors que l’on vit sous l’empire et l’emprise du présent simple. Or, on sait au moins depuis Proust qu’un moment peut être vécu éternellement. » Et d’ajouter pour illustrer son propos : « Depuis Paris avec Desanti, depuis Londres avec De Gaulle ou Paoli, nul n’ignore plus qu’un lieu peut être habité comme nous habiter à distance. » Notre interlocuteur poursuit par un panel de rappels. « La chaire nous donne accès à des personnalités reconnues au niveau international. Nous avons ainsi pu l’inaugurer en présence notamment de Jérôme Ferrari et de Mathias Énard, deux lauréats du prix Goncourt, de Boris Cyrulnik qui a notamment vulgarisé la notion de résilience et les enjeux liés à la petite enfance, ou bien encore d’Alain Chouraqui, le fondateur de la chaire Unesco du Camp des Milles. Nous avons également eu l’honneur d’accueillir Najoua El Berrak, la consule du Maroc. La Méditerranée ne se réduit pas à la latinité. C’est pour cela que nous sommes aussi en lien avec des chaires méditerranéennes, comme avec celle de Chypre par exemple. »

Outre les laboratoires de litératie du futur, au sein desquels les doctorants sont très impliqués, il est souligné que sont proposées des conférences, ou des thèses codirigées avec des professeurs d’autres chaires. Outre le label CNRS déjà très prestigieux, cela permet aux doctorants de disposer d’un encadrement et d’un réseau très attractif grâce auquel il est connecté à ce qui se fait de mieux dans le monde, tout en travaillant depuis l’Université de Corse sur des problématiques appliquées à notre île.

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