Les quatre vérités de Louis Pozzo di Borgo

La communauté d’agglomération de Bastia redresse ses comptes et multiplie les projets

Quatre ans après avoir hérité d’un déficit de 4,5 millions d’euros, la Communauté d’agglomération de Bastia (CAB) affiche un excédent record de plus de 15 millions en 2024. Une transformation profonde, que son président Louis Pozzo di Borgo attribue à une gestion rigoureuse, une réinternalisation massive des services et une cohérence politique entre investissements et vision territoriale.

Par Petru Altiani


En 2020, la Communauté d’agglomération de Bastia affichait un déficit cumulé de 4,5 millions d’euros. En 2024, elle clôt son exercice avec un excédent de plus de 15 millions. Cette bascule, Louis Pozzo di Borgo l’assume comme le fruit d’une réorientation en profondeur de l’action publique : « Nous avons pris des décisions fortes, parfois audacieuses, notamment sur l’internalisation de certaines missions », explique-t-il.Nous avions un doute sur le moment où les effets se feraient sentir. Finalement, les résultats ont été plus rapides que prévu. » L’excédent s’élevant à 15,2 millions d’euros représente notamment 12 millions sur le budget principal, 1,8 million sur les transports, et un équilibre atteint sur la collecte et le traitement des déchets. Un retournement spectaculaire, pour une collectivité encore au bord de la cessation de paiement quatre ans plus tôt. « On ne peut pas nous reprocher d’avoir redressé une collectivité qui allait droit dans le mur », rappelle le président. Aujourd’hui, la CAB est saine, capable d’investir, d’innover et de porter des projets structurants. » Louis Pozzo di Borgo insiste sur la logique globale de gestion : « Nous avons agi sur la masse salariale, mais aussi sur les frais généraux, et surtout sur la part excessive des prestations externalisées. Nous avons démontré qu’à effectif constant, nos services peuvent absorber une charge de travail bien plus importante que ce que certains pensaient. »
L’exemple emblématique du service déchets

À titre d’exemple, le service de collecte des déchets, longtemps déficitaire, a été entièrement réorganisé. « Nous avons redéfini toutes les tournées, supprimé le fini-parti, mutualisé des circuits, et surtout, nous avons rapatrié en régie des prestations qui étaient confiées à des prestataires privés », poursuit l’élu. Cela concerne notamment les points d’apport volontaire, les containers enterrés et la collecte des gros volumes. »
L’impact budgétaire est significatif : une subvention exceptionnelle de 1,9 million d’euros avait été prévue pour équilibrer le service ; seuls 12 000 euros ont finalement été nécessaires. « C’est le résultat direct de nos choix. Nous avons aussi acheté du matériel roulant, ce qui nous permet aujourd’hui d’être autonomes. »
Et Louis Pozzo di Borgo de souligner : « À effectif constant, nous avons absorbé toutes ces nouvelles missions. Cela signifie que nous avons optimisé nos ressources humaines, revalorisé les compétences internes, et gagné en efficacité. Ce n’est pas qu’un gain comptable, c’est aussi un changement culturel dans la façon de penser le service public. »


Une opposition vent debout

Ces bons résultats n’ont pas désarmé l’opposition communautaire. Jean Zuccarelli, élu du groupe Unione per Bastia, s’étonne que ces chiffres n’aient pas été intégrés au budget 2025 voté en décembre 2024. Il dénonce un « manque de sincérité budgétaire » et estime que l’exécutif a « sciemment sous-estimé les marges de manœuvre pour se donner une image de bonne gestion à contretemps ».

Une accusation que rejette fermement Louis Pozzo di Borgo : « La sincérité budgétaire, on l’invoque d’habitude pour masquer des déficits. C’est ce que nous avons connu dans cette collectivité par le passé. Aujourd’hui, on nous reproche de ne pas avoir anticipé des excédents plus importants que prévu. C’est absurde. En décembre, les économies n’étaient pas consolidées. Fallait-il inscrire des résultats hypothétiques ? Cela aurait été irresponsable », lui rétorque-t-il. Le président rappelle par ailleurs que les budgets sont scrutés par les services de l’État : « Nos comptes sont passés à la loupe. Nous n’avons eu aucune remarque. Et il faut rappeler que le passage en régie de certaines missions, l’arrêt de la sous-traitance, et la création de nouvelles recettes comme la redevance spéciale pour la collecte et le traitement des déchets à destination des commerçants de l’agglomération bastiaise, sont des choix politiques. Des choix courageux, pas des artifices. »

Une programmation structurée

Contrairement à ce que certains suggèrent, les investissements engagés en 2025 ne sont pas une réponse improvisée aux excédents de 2024. « La programmation pluriannuelle des investissements, notre PPI, a été adoptée en mars 2021, au théâtre de Bastia », précise-t-il. C’était un moment de convergence, validé par tous les maires et une très large majorité de conseillers communautaires. » Ce programme comprend un montant record de 24 millions d’euros d’investissement en 2025. « Ces projets ne découlent pas des excédents. Ils les précèdent. Ce que nous permet l’excédent, c’est d’éviter de recourir à l’emprunt. Mais la cohérence globale du projet de territoire, elle, est établie depuis quatre ans », affirme Louis Pozzo di Borgo. On ne gouverne pas une intercommunalité à coups de conjoncture. »

Et d’insister « On la gouverne en traçant une ligne, en construisant un cap. Ce cap a été défini collectivement, et c’est ce que nous mettons en œuvre. »


Le nouveau centre technique, un chantier stratégique
Parmi les projets structurants de cette PPI figure la construction du nouveau centre technique à Erbaiolu. Ce bâtiment de 3 000 m², d’un montant de 8,1 millions d’euros, regroupera 80% des effectifs de la CAB, avec une livraison annoncée pour février 2026.

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