l’édito de Jean Poletti

Le printemps corse

 

L’ile est dans l’expectative. Elle ploie sous l’inquiétude, mais espère un futur plus serein.  Cet étrange mélange qui forge désormais l’opinion  est le signe patent d’une mutation  sociétale. La Corse  serait-elle à la croisée des chemins ? Vraisemblablement.  La population  qui affiche un réel scepticisme, veut toutefois croire  à une salutaire éclaircie.  Après la pluie vient le soleil.  L’adage  est connu et nombreux sont ceux qui  voudraient  qu’il ne s’applique pas exclusivement à la  météorologie. De manière diffuse ou explicite, l’idée du salutaire sursaut  se répand. Le constat, cruel et implacable, sculpte  une région à la dérive. Sans repères  ni lisibilité. Le terme de bateau ivre ne parait pas usurpé, concernant une région  sans cesse ballottée. Au cap incertain et naviguant a vue. Depuis  quelque temps cependant elle semble  croiser dans des eaux moins agitées.  Simple parenthèse avant un nouveau coup de tabac ou bien  prémices d’une réelle accalmie ? Et si, enfin, la tempête  s’éloignait  dans le sillage d’une destination nouvelle ?  Certes, l’optimisme béat ne doit pas  fermer l’écoutille de la  réalité. Elle recèle en effets  désastreux  mal vivre, jeunesse  déboussolée, nouveaux pauvres, violence et drogue.  Ce tableau, aussi terrible soit-il, noirci jusqu’à la nausée, laisse pourtant filtrer une mince lueur aux traits de l’embellie. Il ne s’agit nullement d’une illusion  d’optique,  ni d’un signe de la providence.  Dans ce clair-obscur perce  une promesse d’avenir.  Devant le précipice et l’indicible danger, des voix s’élèvent pour alerter. Ils ne se répandant pas dans les médias, bannissent les grandes  théories livresques, ignorent les  préceptes  éculés dont sont friands tant de  faux moralistes.  Aux antipodes de ces élucubrations  ces hommes de bien  évoquent simplement leur vécu, disent l’investissement  qui fait leur quotidien.  Créent des petites entreprises, font preuve d’initiative. Bref, ils montrent par l’exemple qu’autre chose est possible. En cela ils sont précurseurs car au-delà de leurs engagements respectifs, s’esquisse la démonstration d’une confiance renouvelée en cette Corse  qu’ils aspirent à reconstruire. Délaissant le magistère de la parole, ils apportent leur pierre à l’édifice et se veulent en incidence une  authentique force d’entrainement.

Cette  évolution des esprits, initiée  à maints égards par les nouvelles générations sera bien évidemment  décriée par les Cassandre  qui retirés sur leur Aventin ne savent  que flétrir  ou pourfendre. Laissons-les à leurs  stériles dénigrements. Observons  plutôt avec empathie, ceux qui mettent leurs pas  dans cette évolution créatrice chère à Bergson.  Contre vents et marées  ils font œuvre constructive. Leur action vaut mieux que longues tirades. Elle est l’éclatant message  que la Corse qui gagne ne doit pas demeurer un éternel vœu pieu.

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Jean  Poletti

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