Edito – Janvier 2016

Ce que vœux la Corse

Par Jean Poletti

Fin d’année en lambeaux. Une population saisie par le doute et la crainte. Avenir ourlé de nuages noirs. Société qui se délite. Et en cette nouvelle année, le mince espoir que demain sera meilleur qu’hier. Le handicap est lourd. Où va la Corse ? Elle ploie  sous les coups redoublés d’une crise sans précédent. Le marasme économique, entrainant la déroute de l’emploi,  n’est que le cruel révélateur d’une société  sans cap ni lisibilité. Le chômage, les problèmes de logement, la crise socioprofessionnelle, le mal agricole sont les conséquences directes d’une ile  qui n’a pas su se forger un destin. Malgré ses  riches potentialités.  Dresser des constats ou tirer des plans sur la comète  sont tout à la fois synonymes de vacuité et d’illusions. La réalité, chassée par la porte, revient inévitablement par la fenêtre et finit par s’imposer.

Durant trop longtemps   nombreux  furent ceux qui refusèrent  une démarche de vérité. Nombrilisme, fatalisme et certitudes erronées  contribuèrent à freiner les  éventuelles mutations  dont  notre communauté avait pourtant un vital besoin.  Là ou s’imposait un diagnostic lucide propice aux solutions réalistes, ce ne furent qu’écrans de fumée et cécité politiques.  Il eut fallu s’approprier les pleinement les possibilités offertes par les statuts décentralisateurs pour assumer  une responsabilité collective et indiquer un chemin. En lieu et place, l’habitude fut prise de se rassembler devant un invisible mur des lamentations et  trouver  des boucs émissaires.  L’insularité devait nous protéger  de tous les maux.

Le soleil et la beauté des sites assimilaient le tourisme au succès eternel. La manne financière étatique ou européenne s’apparentait à une rente.  Réveil brutal. Songe brisé. Place au cauchemar.  A la roulette de l’imprévoyance rien ne va plus. La Corse a joué a qui perd gagne et se trouve démunie.  Voilà des années que des voix crient au casse-cou. Elles prêchèrent dans le désert.  Inaudibles, elles se brisèrent sur l’indifférence ou l’hostilité de ceux qui voulaient continuer  de profiter  et non servir.  Dans les instances délibérantes  cela devint fâcheuse habitude.  Les propos, enveloppés  du sempiternel intérêt général,  n’étaient trop  souvent  que de la pulitichella ripolinée  d’une couche de modernité.  Mais les postures de circonstance ont atteint leurs limites.  Rongées jusqu’à la corde elles ont cassé dans l’opinion publique.  Le politique  a chuté de son  piédestal. Il n’est qu’à tendre l’oreille pour en être convaincu.  Pourtant,  fustiger  à  l’envi  ceux qui  détiennent un mandat électif sans faire sa propre autocritique  équivaut a s’exonérer de sa propre responsabilité.  Qui met les bulletins dans l’urne sinon le citoyen ?   On a les élus que l’on mérite disait François Mitterrand.  La sentence est d’une logique imparable.  Le temps est venu  d’écrire une autre page.  Celle qui ne traitera plus les problématiques dans l’urgence et de manière ponctuelle, sous la pression des évènements, mais  intégrera une  authentique vision globale  de l’avenir.

La  Corse  est en miettes et a la dérive.  Il faut la remettre à l’endroit. Dans le sens de l’histoire.  Nul n’est coupable individuellement, mais  tous avons une part  dans cette responsabilité collective, amer fruit d’une démocratie affaissée et d’une société civile qui rechigne à jouer son rôle de sentinelle.    Osons adapter à la Corse  une célèbre formule de John Fitzgerald Kennedy : Ne  vous demandez pas ce que le pays peut faire pour vous, demandez vous ce que vous pouvez faire pour votre pays.  Voilà résolution  susceptible d’initier  une sorte de révolution de velours.  Elle aurait l’insigne mérite d’en finir avec la vaines querelles, et privilégier l’essentiel a l’accessoire.  Cela  s’appelle prise de conscience.  En un mot citoyenneté.

Se souhaiter les meilleurs vœux ?  Une belle tradition. La réussite de notre ile ne passe cependant pas par la providence, mais appelle notre implication.  A l’aube de 2016 est-il chimérique de prendre un tel engagement ?

En tous cas bon di e bon annu e bon capu d’annu, pace e salute per tuttu  l’annu

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