Edito – Novembre 2013

Une fenêtre sur l’espoir

Eternel recommencement. Sempiternelles redites. Arguments  ressortis de leur naphtaline.  La Corse se meurt. Tel est le crédo  ambiant.  Largement partagé. Au point d’être consensuel. Le constat est cinglant. Il relève  de l’évidence. Mais le rappeler   en leitmotiv  aux  premières brises    automnales  relève de   l’artifice sémantique.  Extirper l’île de l’ornière implique  une analyse exhaustive,  marquée  au sceau de la sincérité.  Comment en est-on arrivés là ? Voilà  l’interrogation  prosaïque et cependant magistrale qu’il convient de poser.  Mettre a l’index  l’Etat. Se draper dans la toge du procureur. Bref, accuser  toujours et encore les autres relève d’un scenario qui a fait son temps.

Paris a certes commis des maladresses sinon des fautes  par méconnaissance ou  perfidie. Mais ici, par confort, lâcheté intellectuelle ou espoirs de prébendes le silence  fut souvent assourdissant. Et la situation s’effilocha. Jusqu’à devenir délétère.  Prés carrés, sentiment d’impunité.  Petits arrangements entre amis.  Porosité entre des mondes  par définition antagonistes. Autant d’entorses, qui se conjuguèrent  au fil du temps, pour faire éclore une société sans repères ni  lisibilité.  Ce  théâtre d’ombres ou s’agitaient  certains, passa  du vaudeville à la tragédie. L’effet de contagion fit le reste.  Aussi, entendre, à défaut d’écouter, tels  édiles  proposer que demain ils raseront  gratis suscite, au mieux,   dans le peuple un scepticisme poli. Comment d’ailleurs pourrait-il en être autrement ?

La sagesse populaire sait  d’instinct qu’un autre pouvoir, invisible mais omniprésent, titre déjà quelques ficelles.  La beauté de nos sites  n’engendre pas que la bucolique contemplation.  Certains ont des rêves plus prosaïques.  La bataille de l’immobilier  est devenue sanglante. Nul ne l’ignore. La manne du Plan  exceptionnel d’investissement aiguise des appétits. Point n’est besoin de multiplier les exemples pour  souligner que le centre de gravité  économique de l’île a changé de nature et de dimension. Face à cette loi  du  fric, pour reprendre  le propos de Dominique Bucchini, notre logique comportementale s’est métamorphosée.  La solidarité, les valeurs cardinales qui fondent la citoyenneté,  se réduisent comme peau de chagrin. Quand  un microcosme  affiche une réussite  aussi mystérieuse qu’insolente,  nombreux sont ceux qui veulent marcher dans leurs pas. Ou du moins  bénéficier des miettes.  Nul besoin d’en appeler à Freud ou Lacan pour en être convaincu.

Tristes tropiques  écrivait Claude  Lévi-Strauss. Et en Corse ?  Une fenêtre d’espoir s’est ouverte. Même si les Cassandre  et autres  polémistes de faible veine ne veulent rien voir,  le vote de la collectivité territoriale  sur le projet de réforme  pourrait bien être une planche de salut.  Sans préjuger du résultat final, il  indique que la situation est telle que  donner   une nouvelle chance à notre région n’est plus seulement utile mais nécessaire.  Et même ceux qui ont voté contre expliquèrent  que si leurs priorités  étaient autres,  la Corse  avait, en toute hypothèse,  l’urgent besoin de sortir des chemins de traverse.

Vous avez dit prise de conscience ?

                                                               Jean  Poletti

 

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