Emmanuelle de Gentili : « Cine Donne est un levier d’émancipation »

Alors que la quatrième édition du festival Cine Donne s’est tenue du 20 au 27 mars dernier, Emmanuelle de Gentili revient sur la genèse, les évolutions et les temps forts de cet événement consacré aux droits des femmes, à leur représentation et à leur place dans une société en mutation.
Entretien avec Emmanuelle de Gentili, vice-présidente de la Communauté d’Agglomération de Bastia (CAB) en charge de l’inclusion, de la prévention et de la citoyenneté.
Cine Donne fait partie d’un panel d’actions déployées par la CAB. Quelles initiatives majeures ont été mises en place depuis 2020 ?
Depuis 2021, nous avons lancé plusieurs actions structurantes. Parmi elles, les « Boîtes aux lettres Papillons », installées dans les 14 infrastructures de la CAB, permettent aux enfants et adolescents de signaler les violences qu’ils subissent ou dont ils sont témoins. La même année, nous avons créé « Per Ella », une manifestation organisée chaque 25 novembre, à l’occasion de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Elle propose conférences et échanges autour des violences genrées, de l’insertion professionnelle et de la représentation des femmes dans le monde du travail. En 2022, nous avons initié Cine Donne, un festival pensé comme un espace de réflexion et de sensibilisation. Il s’est enrichi au fil des éditions. En 2025, grâce au soutien de l’appel à projet européen Interreg « Femmes Libres », nous avons pu intégrer au festival un axe fort d’échange de bonnes pratiques sur l’hébergement et la réinsertion des femmes victimes de violences.
Comment est né le festival Cine Donne ?
Il est né d’une volonté forte de faire du cinéma un outil au service des droits des femmes. La CAB, sous l’impulsion du président François Pozzo di Borgo, a souhaité s’engager activement pour mettre en lumière les discriminations et les mécanismes patriarcaux encore très présents dans notre société. Cine Donne, depuis quatre ans, est l’un des vecteurs de cette ambition. Il s’appuie sur un réseau solide de partenaires institutionnels et associatifs, et offre un espace de dialogue entre les générations, notamment les plus jeunes : collégiens, lycéens, étudiants de l’Université de Corte, mais aussi le grand public, autour de tables rondes avec des représentants de la justice, de la sécurité, du monde associatif.
Quelles ont été les nouveautés de l’édition 2025 ?
Après trois années d’expérimentation, nous avons atteint une forme de maturité, tant dans la vision politique que dans l’organisation logistique. L’objectif, dès le départ, était de faire du cinéma un prétexte à l’échange. En 2025, nous avons donc choisi une programmation allégée mais exigeante, avec des films percutants, porteurs de messages forts.
Le format s’est recentré pour permettre plus de temps de parole aux intervenants – chercheurs, artistes, professionnels – et donner une vraie valeur ajoutée aux débats. Le public, qu’il soit scolaire ou adulte, a particulièrement apprécié cette densité, cette profondeur des échanges.
Quels ont été les moments marquants cette année ?
Il y en a eu plusieurs, mais la présence de Julie Gayet, venue présenter son film Olympe de Gouges, a été particulièrement forte. Elle a su allier disponibilité, engagement et écoute. Sa venue a rencontré un grand succès populaire. Nous avons aussi été marqués par la richesse des débats, notamment avec des intervenants comme le professeur de médecine Pierre Jouannet, la sociologue Brigitte Rollet, la psychiatre Vannina Micheli-Rechtman, ou encore l’avocate Isabelle Steyer, spécialiste des droits des femmes. Tous ont contribué à renforcer la légitimité de Cine Donne comme action de sensibilisation. Enfin, la forte mobilisation des établissements scolaires a été un signal très encourageant. Elle montre une réelle volonté de s’impliquer dans ce mouvement d’émancipation.
Comment voyez-vous l’avenir de Cine Donne ?
Cine Donne est désormais bien installé dans le paysage culturel et social bastiais. Avec une ligne éditoriale plus ciblée et une programmation plus fluide, nous avons trouvé un équilibre. Mais l’idée n’est pas de nous arrêter là. Nous voulons que le festival soit un point de départ à des actions tout au long de l’année. Que cette dynamique d’échange, de sensibilisation et d’émancipation se poursuive au-delà du mois de mars. Cine Donne est un festival engagé, mais surtout un outil de transformation sociale.
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