Que je pl@ide…

De propos qui dérapent à une justice qui se meurt en 2 mégasbits par seconde, et si dans le tumulte des réformes judiciaires l’on s’attardait sur le rôle de l’avocat ?

Par Maître Marie Colombani Avocate au barreau d’Ajaccio

Ce professionnel du droit qui jure d’exercer ses fonctions avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité.
Ce serment, il le prête à l’égard de tous: coupables, fautifs, victimes, riches, démunis, monstres ou têtes blondes que ce soit sous les feux des projecteurs ou à huis clos ou encore dans l’intimité de son cabinet. Cet auxiliaire de justice souvent envié, fréquemment décrié, parfois malmené et qui malgré tout reste debout pour soutenir les intérêts et causes de ceux qui les lui ont confiés sans ménager sa peine ni son temps. Ce temps que l’on rend responsable du coût trop élevé de la justice, de la lenteur de cette même justice et que le gouvernement au fil des quinquennats tente par tous moyens de réduire à grand coup de réformes ! C’est aussi l’accès à l’avocat que l’on essaie de diaboliser en autorisant la multiplication des legaltech sous-entendant ainsi que ces plateformes délivrent une prestation juridique identique à moindre coût ce qui n’est bien évidemment pas le cas! Si tous les avocats sont des juristes, l’inverse n’est pas vrai. Je rappellerai donc que l’avocat, spécialiste ou pas, est formé spécifiquement pour du conseil, de la négociation, de la rédaction d’actes, de la représentation et de l’assistance devant toute juridiction qu’elle soit judiciaire ou administrative. Je soulignerai qu’il propose une écoute attentive mais aussi délivre un conseil éclairé et développe une stratégie procédurale que seules son expérience et ses compétences lui permettent d’ériger aux seuls intérêts du justiciable dans le cadre d’une convention d’honoraire en accord avec celui-ci.

Parent pauvre
La connaissance de la règle de droit ne saurait suffire tant la gestion d’un contentieux doit s’appréhender dans sa globalité notamment dans le cadre des conciliations rendues obligatoires aujourd’hui. J’insisterai enfin et surtout que la prestation d’avocat est garantie par le secret professionnel, bénéficie d’une police d’assurance et reste contrôlée par des institutions disciplinaires voire par le procureur de la République. Aucune plate-forme ou autre structure d’accueil du justiciable ne garantira une telle prestation à ce niveau de qualité. Cette qualité que l’on met à mal en prétendant le contraire alors que des dispositions sont prises pour imiter les recours en justice et évacuer rapidement les affaires. Je ne crois pas en effet pertinent de supprimer des tribunaux alors que l’on évoque une justice de proximité, de ne pas revaloriser le seuil de l’aide juridictionnelle alors que l’on souhaite un accès à la justice pour tous, de maintenir un budget public annuel dédié à la justice à moins de 2% alors que magistrats et personnels de greffe sont en sous- effectif. Je ne crois pas plus pertinent de rappeler voire d’insister sur le fait que l’avocat n’est pas obligatoire devant la plupart des juridictions et contentieux et de laisser sous-entendre que
son assistance ne changera rien…

La justice c’est… net !
Il est vrai que parfois notre argumentation n’est pas toujours suivie mais qui mieux que l’avocat peut soulever une prescription, une péremption ou permettre d’obtenir une relaxe ou un acquittement ?
Qui mieux que l’avocat peut assurer la tenue d’un débat personnalisé face à une justice prédictive à laquelle il est de plus en plus fait référence dans les débats judiciaires ? Comment croire en effet en l’efficacité d’une justice de progrès sous couvert de la saisine d’une juridiction par le justiciable via le net alors que 15% des citoyens n’en disposent pas, qu’un 1/3 ne maîtrise pas l’outil infor- matique et surtout que la compréhension des règles de droit et de procédure ne sera sûrement jamais à la portée de tous. Le justiciable n’est pas dupe mais il peut facilement se laisser convaincre de se confronter seul à la justice, à grand renfort d’informations ou consultations obtenues sur le web, outil génial de notre époque. Trop d’information tue l’information et aujourd’hui, le justiciable ne sait plus à quel saint se vouer, le XXIe siècle serait-il le temps de saint-uber ?

Zola éternel
La présence aujourd’hui de près de 140 avocats inscrits au Barreau d’Ajaccio me laisse espérer le contraire parce que j’ai la conviction qu’ils sont l’outil le mieux adapté pour garantir une justice de qualité au justiciable de par leur proximité et leur éthique professionnelle. Ils restent l’interlocuteur privilégié du magistrat. Je me permettrais de conclure en paraphrasant Zola pour vous confier que je n’ai qu’une passion, celle de la lumière au nom de la défense des droits de l’Homme qui a tant souffert et de l’humanité qui a droit au bonheur et à la justice. Ma protestation enflammée n’est que le cri de mon âme, vous l’aurez compris, d’avoc@t.

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